Souvenir, souvenir...
EN FLÂNANT AVEC ROGER GICQUEL
(1996.1997)
Quand j'intègre le magazine "EN FLÂNANT" la formule est très rodée, sa production est d'une efficacité redoutable. Comment pourrait-il en être autrement pour arriver à produire un magazine de 52 mn tourné en trois jours et monté en deux, avec mixage dans la foulée ! L'émission est préparée en amont par Philippe Gallouedec qui cale absolument tout (il n'y a pas de repérage). Roger part en début de semaine avec l'équipe et laisse au retour le réalisateur effectuer seul le montage, en toute confiance; lui se consacre aussitôt à la préparation de l'émission suivante. Et chaque semaine, çà recommence. Le rythme est soutenu, presque affolant. L'émission est donc assurée en équipe légère par un petit noyau de techniciens aguerris et rompus à l'exercice, car c'en est un ! Personne n'a droit à l'erreur, chaque émission est un challenge; elle ne peut exister que par la compétence et la motivation. C'est éprouvant mais jouissif et les tournages sont réputés pour leur "bonne humeur", une fois la journée finie ...
J'ai aimé travaillé avec Roger. J'ai apprécié son professionnalisme, notamment ses qualités de "généraliste" capable de passer avec une égale aisance d'une enquête sur la filière économique des algues en Bretagne, à une découverte du fonctionnement de Météo France en passant par une exposition de crèches de Noël au château de Trévarez ! C'était de surcroit un professionnel chaleureux et patient avec ses invités, en dépit de la pression réelle de nos conditions de tournage. Et j'ai à l'époque découvert avec surprise un homme doté d'une personnalité assez éloignée de l'injuste réputation qui lui fut faite suite à son "La France a peur" (phrase d'introduction du journal télévisé qu'il présentait le 18 février 1976 sur de TF1, à propos de la macabre "affaire Henri"), une phrase sortie de son contexte et ainsi passablement dénaturée (à écouter sur YouTube).
J'aimais voir Roger s'isoler un moment juste avant le tournage des séquences, sortir ses petites fiches bristol de sa poche, se mettre en mémoire et en bouche son prochain lancement de sujet, pendant que nous préparions le plan. Lui qui "assurait " tant, j'aimais aussi le voir parfois "se planter" en fin de tournage, fatigué, quand il nous fallait faire et refaire les bandes-annonces de la semaine suivante, et qu'il partait d'un éclat de rire avec l'équipe, sur un lapsus, une erreur de date ou un trou de mémoire qui se répétait ! L'émission était "en boîte" mais on s'écroulait un peu, tous avec lui ...
Roger s'était installé définitivement en Bretagne. A l'occasion de ses obsèques en mars 2010, Philippe Gallouedec lui a rendu un bel hommage dans une petite église des bords de Rance, à travers un texte joliment écrit, teinté d'humour et de beaucoup de respect.